Une rafale de forfaits
Le malheur des uns fait le bonheur des autres …
Suite aux forfaits de Richie Fallows et Ivan Yuen, Auguste Dussourd et Sébastien Bonmalais ont appris hier matin qu’ils pouvaient faire leurs valises et prendre un vol vers l’Égypte, pour participer au El Gouna International Squash Open 2021 (doté de 363 000 $, répartis de manière égale chez les hommes et chez les femmes).
Il y aura donc 7 joueurs français dans le tableau masculin d’un tournoi Platinum.
« C’était l’objectif qu’on avait annoncé après le stage effectué pendant le Black Ball Open il y a deux ans et demi, auquel je fais souvent référence, » confie l’entraîneur Renan Lavigne.
« Le matin, nos joueurs voyaient les autres se préparer pour leur match, je pense que ça a contribué à leur donner envie d’atteindre ce niveau. C’est bien d’être la deuxième nation la plus représentée derrière l’Égypte (NDLR : à El Gouna, 20 joueuses et 16 joueurs du pays hôte seront en lice mais pas le n°1 mondial Ali Farag, forfait pour raisons personnelles), néanmoins ce n’est qu’une étape intermédiaire : ils ont la capacité de faire encore mieux et c’est maintenant à eux de le prouver. »
Au vu du tirage globalement clément, on se prend à rêver d’une grosse présence des Bleus au troisième tour. De son côté, Renan Lavigne préfère voir:
« au jour le jour, c’est devenu la norme dans le contexte actuel. Une chose est sûre, les gars ont une grosse envie de jouer et de faire des résultats. »
À son grand désarroi, l’entraîneur national suivra tous ces matches derrière son écran, l’entourage des joueurs n’étant toujours pas autorisé à intégrer la bulle sanitaire.
« On constate qu’en tennis, les staffs accompagnent les athlètes, » déplore-t-il. « Si l’on ajoute à cela le fait que que la Fédération européenne a déjà annulé toutes ses compétitions de l’année 2021, le squash est un sport d’exception …
Cette interdiction pourrait à priori être prolongée pour le championnat du monde individuel (14-22 juillet à Chicago) : c’est regrettable car le coaching est un facteur important, pendant ou entre les matches. Nous avons alerté la PSA à ce sujet, et j’espère vraiment qu’elle révisera sa position. »
Grégoire Marche
Seul Français bénéficiant d’un bye au premier tour, Grégoire Marche (n°15 mondial) connaît déjà son adversaire en 1/16ème de finale : ce sera Miguel Angel Rodriguez (n°10), qu’il avait battu en trois jeux au même stade de la compétition lors du dernier tournoi du BlackBall.
« Même s’il y a des inconnues sur l’état de forme des joueurs en ce moment, Greg va forcément s’appuyer sur ce match, » estime Renan Lavigne.
Après sa victoire face au Colombien, il s’était ensuite incliné face à Tarek Momen (n°3) mais la route est plus dégagée à El Gouna : s’il confirme, ses quatre adversaires potentiels – dont Lucas Serme – sont classés au-delà de la 30ème place, avec en ligne de mire un quart possible face à ce même Momen.
En toile de fond, il y a également une qualification possible pour les CIB World Tour Finals, du 22 au 27 juin au Caire*, qui serait une première pour lui.
« Même si Grégoire n’en parle pas, il y pense forcément ! » indique l’entraîneur national. « Le contexte est particulier et certains joueurs regrettent que cette compétition ait lieu avant le championnat du monde et le British Open, cependant faire partie du top 8 sur une saison est très gratifiant. »
Grégory Gaultier
Malgré sa défaite en 1/8ème de finale au Black Ball Open face à Paul Coll, Grégory Gaultier (n°25) a montré de belles dispositions et une nette amélioration en termes de mobilité.
« On échange régulièrement, et même si je suis sûr que c’est dans un coin de sa tête, Greg ne parle plus du tout de son genou, » confie Renan Lavigne. « Je sais qu’il s’est bien entraîné dernièrement, notamment avec le Suisse Dimitri Steinmann qui va de temps en temps à Prague. »
Si le premier tour face à l’Anglais Nathan Lake (n°44) ne devrait normalement pas lui poser de problèmes, le French General a ensuite rendez-vous avec l’un des hommes en forme du moment, Fares Dessouky (n°7).
« C’est le moins bon tirage parmi tous les Français, » affirme l’entraîneur national. « Mais même s’il a eu de très gros résultats récemment, le niveau de Dessouky peut s’avérer fluctuant. Il est capable de donner un jeu, et Greg n’en aurait plus que deux à gagner … »
S’il parvient à s’offrir sa première victoire sur un membre du top 8 mondial depuis son retour de blessure, Gaultier aura ensuite un tableau intéressant : dans sa partie, on retrouve Borja Golan (n°26), Declan James (n°24) et Patrick Rooney (n°49), qui vaut largement mieux que son classement au vu de ses performances récentes. Le match entre les deux Anglais sera l’un des chocs des 1/32ème de finale jeudi.
Lucas Serme
C’est une période de changement pour Lucas Serme : le n°36 mondial a récemment annoncé son partenariat avec un nouvel équipementier, Unsquashable, mais aussi que lui et son épouse Anna quittaient Paris pour emménager à Prague.
« Ça s’est fait assez rapidement, pour en avoir parlé avec lui il aura de bonnes conditions là-bas, » confie Renan Lavigne. « Il aura accès à deux clubs, et pourra s’entraîner avec Grégory Gaultier. »
Au premier tour, le Français affrontera l’Indien Vikram Malhotra (n°47).
« C’est un bon tirage, face à un joueur fantasque, que Baptiste Masotti avait balayé au Black Ball Open. »
S’il tient son rang, Serme affrontera ensuite Mahesh Mangaonkar (n°46) ou Raphael Kandra (n°31), qui n’est plus au niveau qui lui avait permis d’atteindre les demi-finales du British Open en 2018.
« C’est un tableau intéressant, et Lucas est en général plutôt bon dans ce cas de figure, comme encore dernièrement au Qatar. »
S’il parvient à profiter de cette opportunité, le joueur d’Annecy pourrait croiser la route de Grégoire Marche en 1/8ème, à condition que celui-ci écarte Rodriguez au tour précédent.
Baptiste Masotti
Sur sa lancée d’une très belle prestation face à Mohamed El Shorbagy au Black Ball Open, Baptiste Masotti (n°37) essaiera de confirmer à El Gouna, et ça commence par un premier tour face à Edmon Lopez (n°51).
« L’Espagnol est un combattant, mais il n’a quasiment pas joué depuis un an, » indique son entraîneur au pôle France d’Aix-en-Provence. « Compte tenu de son niveau de jeu actuel, Baptiste a les armes pour passer ce tour, notamment en termes de rythme et de densité physique. »
Si la logique est respectée, le Niortais sera ensuite opposé à George Parker (n°43) ou à Todd Harrity (n°48)
Victor Crouin
Au Black Ball Open, Victor Crouin (n°41) avait été lourdement battu par Grégory Gaultier, mais Renan Lavigne n’a aucun doute sur la faculté du jeune Toulonnais à rebondir.
« Il est toujours pertinent dans l’analyse de ses prestations, victoires ou défaites. Récemment on a décortiqué l’un de ses matches à la vidéo, il a préféré que ce soit son quart de finale face à Grégoire Marche au championnat de France Élite plutôt que le Black Ball, preuve qu’il a mis ce match derrière lui. »
Comme Victor Crouin a pris la place de Mathieu Castagnet dans le tableau, il jouera donc contre Auguste Dussourd au premier tour, et le vainqueur affrontera Alan Clyne ou Shahjahan Khan.
Auguste Dussourd
« Auguste avait un problème à un doigt de pied, qui est complètement guéri donc de ce côté-là c’est une bonne chose, » précise Malcolm Tullis, son entraîneur au pôle France de Créteil.
« Par contre, il n’a pas pu beaucoup s’entraîner ces dernières semaines en raison d’une petite inflammation à une cheville, et n’est donc pas au top physiquement. On va préparer le match au mieux dans le peu de temps imparti et il va aller sur le court pour défendre ses chances.
Dans le passé, il a souvent fini numéro 1 sur la liste d’attente des gros tournois, c’était donc une opportunité à ne pas laisser passer : ça va lui permettre de retrouver les routines de la compétition, notamment en perspective du championnat du monde mi-juillet à Chicago. »
Sébastien Bonmalais
Sébastien Bonmalais (n°61) a vécu ce qu’on appelle communément un ascenseur émotionnel ces dernières heures. Battu en finale de l’open de Mulhouse dimanche, le Réunionnais a appris le lendemain matin qu’il était intégré au tableau d’El Gouna.
« Ça permet d’effacer la défaite plus rapidement, » affirme Renan Lavigne. « Seb aurait déjà dû disputer son premier Platinum à l’automne dernier (NDLR : sérieusement touché par la Covid-19, il n’a pas joué pendant un an) et cette nouvelle va lui faire un bien fou : non seulement moralement, mais aussi parce que les points marqués vont l’aider à participer aux prochains “majeurs”, notamment le championnat du monde. »
Relativement épargné par le tirage au sort, Bonmalais affrontera Mohamed El Sherbini (n°33) jeudi.
« Dans un premier temps, on s’est concentré sur l’organisation du voyage et la récupération, » précise son entraîneur. « On va prendre le temps de parler de l’adversaire avant son départ. Avec ses qualités physiques, Seb peut poser des problèmes à l’Égyptien, surtout sur un court traditionnel. Même si ce tournoi est du bonus pour lui, il faut se projeter sur le match et se mettre en position de le gagner. »
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Les Bleues à la relance
Il y aura quatre représentantes françaises présentes à Gouna, avec le retour de Coline Aumard après 244 jours d’absence sur le circuit…
Camille Serme
On avait quitté Camille Serme sur une défaite en quart de finale du Black Ball Open face à Amanda Sobhy. Perturbée dans sa préparation par un souci aux abdominaux, la Française avait un peu calé physiquement dans le cinquième jeu, après plus d’une heure d’un combat intense.
« L’IRM a montré qu’il n’y avait plus aucune lésion, » témoigne son entraîneur Philippe Signoret. « Malheureusement, Camille s’est fait une déchirure au mollet il y a un peu plus d’un mois et a reçu un traitement PRP, comme elle l’avait fait pour les abdominaux. Même si ces pépins physiques sont un peu embêtants, on fait avec. Aujourd’hui (NDLR : cet entraînement a été réalisé mardi dernier), elle a fait sa première opposition depuis un mois et demi contre Joshua Jacques Phinera, un jeune joueur très solide (n°3 en -19 ans). Elle a gagné 3-2 en une heure, et a montré de belles choses.
Tous les tournois sont importants, mais El Gouna est une étape dans sa préparation qui doit lui permettre d’arriver au top au championnat du monde à Chicago : c’est le gros objectif de la saison. Que Camille gagne ou qu’elle perde en quart, on s’en servira pour évaluer où elle en est. »
« L’objectif pour Camille est d’arriver au top au championnat du monde »
Son parcours dans la station balnéaire Égyptienne commencera au deuxième tour face à Tinne Gilis (n°17), avec en ligne de mire un 1/8ème de finale face à Joshna Chinappa (n°11), voire Hollie Naughton (n°20).
La Cristolienne n’a jamais perdu contre ces trois joueuses, mais Philippe Signoret estime
« qu’il n’y a plus de matches faciles aujourd’hui. Il faut être à son meilleur niveau dès le début de la compétition pour ne pas se compliquer la tâche. »
Camille Serme n’a pas croisé la route d’Hania El Hammamy (n°6) lors des deux derniers tournois, et elle pourrait la retrouver en quart. Après une irruption fracassante sur le devant de la scène en 2020, la jeune Égyptienne a marqué légèrement le pas dernièrement.
« Elle n’est plus la jeune joueuse insouciante d’il y a quelques mois, » analyse l’entraîneur national. « Depuis, elle a annoncé qu’elle visait la place de numéro 1 mondiale, c’est courageux de sa part mais ça engendre inévitablement de la pression. De toute façon, on s’aperçoit que mis à part Nour El Sherbini, toutes les top players ont des hauts et des bas. »
Les chiffres donnent raison à Philippe Signoret : la numéro 1 mondiale n’a pas été éliminée avant les quarts de finale sur le circuit depuis février 2015, soit 49 tournois !
Coline Aumard
Le 18 septembre 2020, Coline Aumard (n°22) était éliminée au deuxième tour du Manchester Open par Salma Hany.
Huit mois plus tard, elle va faire son retour à la compétition à El Gouna, après avoir lutté contre une blessure compliquée à un pied.
« Ça faisait même plus d’un an que je n’avais pas pris l’avion, » raconte la Française, qui ne cache pas son plaisir de retrouver le circuit.
« Une absence aussi longue, ce n’est pas rien, » estime Philippe Signoret. « J’ai parlé avec Coline dernièrement (NDLR : elle réside et s’entraîne à Nottingham). La bonne nouvelle, c’est qu’elle n’a plus aucune douleur, et elle a évidemment une grosse envie de jouer ! Elle a un premier tour à sa portée, mais derrière ça risque d’être compliqué. »
En effet, la joueuse d’Annecy affronte tout d’abord la jeune Jana Shiha (n°55) avant en cas de victoire de se mesurer à Joelle King (n°8).
« Pour Coline, c’est avant tout un tournoi de reprise, et celui de Manchester lui permettra d’enchaîner les matches, » conclut l’entraîneur de l’équipe de France.
Melissa Alves
Juste après sa défaite au Black Ball Open, 15-13 au 5ème jeu face à Olivia Fietcher, Mélissa Alves (n°32) n’avait pas caché sa déception d’avoir manqué l’opportunité d’accéder au troisième tour d’un tournoi Platinum pour la première fois.
« Elle a mis un peu de temps à digérer, » confie Philippe Signoret. « Un peu comme Marie Stéphan, Mélissa a besoin de se trouver devant le fait accompli pour comprendre qu’elle doit faire évoluer son jeu si elle veut franchir des caps supplémentaires. Ce qui rend mon travail d’entraîneur très riche, c’est que ces évolutions requises ne sont pas les mêmes pour chacune de mes joueuses …
En analysant le match à la vidéo, on a mis le doigt sur les moments où l’Américaine avait pris le dessus, et ce qu’il aurait fallu faire pour inverser la tendance. Pour cette raison, c’est très frustrant pour moi de ne pas être aux côtés des filles en ce moment … »
Comme son homologue Renan Lavigne, il regrette l’obstination de la PSA de ne pas autoriser les entraîneurs à intégrer la bulle sanitaire (« On leur a même fait savoir qu’on était prêts à payer les tests nous-mêmes, »).
En attendant, elles devront à nouveau faire sans lui à El Gouna, notamment Mélissa Alves face à Menna Hamed (n°52).
« C’est une adversaire à prendre au sérieux, » prévient Philippe Signoret. « Heureusement, Énora Villard l’a souvent côtoyée lors de ses séjours en Égypte, elle pourra briefer Mélissa qui ne partira pas dans l’inconnu. »
En cas de succès, la Guyanaise affrontera ensuite Nada Abbas (n°33) ou Alexandra Fuller (n°39). Une autre belle occasion d’accéder au troisième tour, et de s’offrir un choc face à Hania El Hammamy (n°6) … « Son tableau ressemble à un peu celui du Black Ball, à la différence près qu’elle a été perturbée dans sa préparation par une blessure au mollet. Ce n’est pas idéal, mais j’ai tendance à penser que ce n’est pas en quinze jours qu’on perd son squash. »
Enora Villard
Après une période compliquée, Énora Villard (n°46) s’était bien relancée avec une défaite honorable face à Farida Mohamed au Black Ball Open, puis un titre à l’open des Bretzels.
Malheureusement, la Cristolienne a été touchée par la Covid-19 juste avant le tournoi PSA dans son club.
« Elle a passé une dizaine de jours difficiles, pendant lesquels elle ne s’est pas du tout entraînée » confie Philippe Signoret. « Pourtant, elle est repartie tambour battant, c’était presque surprenant. Elle a tout de suite retrouvée la dynamique dans laquelle elle était avant cet épisode. »
Au premier tour de l’open d’El Gouna, Villard sera opposée à l’Américaine Haley Mendez (n°42)
Les CIB PSA World Series Finals: Qui peut se qualifier?
*Actuellement 10ème du “Leaderboard”, Grégoire Marche va dépasser Diego Elias, absent à El Gouna. Il compte 537,5 points de retard sur le 8ème, Mostafa Asal, sachant que ce dernier n’est pas inscrit au Manchester Open (7-13 juin), dernière opportunité de marquer des points avant les finales du World Tour.
Grégory Gaultier peut également encore mathématiquement se qualifier, alors que Camille Serme est déjà assurée de disputer les “Masters” du squash pour la sixième année consécutive.
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Le Saviez-vous?
El Gouna est une forteresse quasi-imprenable.
Sur les douze compétitions organisées dans la station balnéaire (neuf tournois masculins, deux tournois féminins et un championnat du monde féminin), Grégory Gaultier est le seul joueur non Égyptien à s’être imposé, c’était en 2017, contre Karim Abdel Gawad, en trois jeux secs.
2017, une année bénie au beau milieu de la plus belle période de sa carrière (6 titres remportés de suite, et seulement 6 jeux perdus lors en 27 matches !).